Le droit à la déconnection se connecte au droit du travail

La mesure était attendue par certains salariés et chefs d’entreprises. Devant les avancées de la technologie des communications au travail, nous sommes toujours plus connectés. Une fois la journée terminée, nous avons du mal à débrancher. Nous nous servons encore de nos écrans parfois jusqu’au coucher. Ce phénomène est facteur de troubles, notamment du sommeil. Le gouvernement a légiféré pour faire reconnaître le « droit à la déconnection ».

Le droit à la déconnexion est désormais applicable dans le cadre de l’article 55 de la loi Travail portée par Myriam El-Khomri et adoptée l'an dernier. Les entreprises doivent, depuis le 1er janvier, se rapprocher des syndicats dans la négociation sur la régulation de l'utilisation des outils numériques. À défaut d'accord, elles devront préciser dans une charte les modalités de ce droit à la déconnexion. L'objectif est d'assurer le respect des temps de repos et de congé légaux dans le contexte du respect de la vie familiale et privée. En clair, il s’agit de dissuader les salariés trop addicts d’assaillir littéralement leurs collègues d'appels et de mails professionnels hors du temps travail.

Les changements sociaux et le travail

Nous sommes dans l’ère de l’après automatisation. L’époque est à l’uberisation et à la mobilité. Dans bien des secteurs, le lieu de travail s’est dématérialisé comme les documents. De plus en plus de salariés et de responsables interviennent « connectés » de l’extérieur de leur entreprise. La frontière entre vie professionnelle et privée est imperceptible, la journée de travail n'est plus continue. Les formes de dialogue social ont évolué à vitesse grand V. Le progrès technologique et une certaine érosion des valeurs sont les acteurs principaux d'un changement profond des rapports professionnels. Travailler dans un lieu variable ne dépend plus de la position hiérarchique ou d’un poste spécifique. Nous sommes 37% à ne pas débrancher selon une enquête réalisée en septembre 2016 par le cabinet Eléas. 45% des actifs affirment devoir penser à trop de choses à la fois. Ils sont 62%, dont une large majorité de cadres à réclamer une régulation des outils numériques professionnels. 40 % d’entre nous apprécions la souplesse horaire offerte par le numérique. C'est à cette nouvelle réalité que le droit du travail est adapté, et qu'un droit à la déconnexion est inscrit dans la loi. 

Un concept simple mais un encadrement ciblé

L’environnement économique et technologique  actuel nous pousse sans limite à la compétition. Nous avons accès aux données de l’entreprise à distance, et notamment à la maison, que ce soit bien sûr le téléphone mais aussi, les courriels, l’agenda ou d’autres types de fichiers. Nous devons en faire toujours plus, hors des heures de travail, quitte à basculer vers le mal-être permanent. Les salariés eux-mêmes sont ainsi parfois demandeurs de ce travail extra-travail, donnant ainsi l’illusion de que ce qui a été fait chez soi ne sera plus à faire au travail. C’est juste une illusion, puisque d’autres tâches viendront encore, et des impondérables viendront peut-être s’y greffer. L’avantage du dispositif du droit à la déconnexion est évidemment de débrancher quelques heures. Si le concept est simple, il convient cependant d’y apporter des précisions :

En effet, la loi ne cible que les entreprises de 50 salariés et plus. Les autres ne sont donc pas touchées.

Les salariés ne sont pas obligés de répondre à des messages professionnels en dehors des heures de travail

La loi prévoit la mise en place de formations par des MOOC d’entreprise sur les risques pour la santé de l’hyper-connexion. Ces formations se font en ligne : Massive Open Online Course.

Mais elle ne prévoit aucune sanction envers les entreprises n’ayant pas conclu d’accord ou édicté de charte.

En revanche, un employé peut poursuivre son employeur au motif de harcèlement moral s’il constate l’utilisation abusive des technologies hors travail, hors accord ou charte. Quoi qu’il en soit, un employé pouvait déjà solliciter les Prud’hommes en cas d’abus, notamment par la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002.

Cette mesure a pour objectif de lutter contre un état d’épuisement total nommé le burn-out.

Le burn-out : un fléau rampant

Tout le monde connaît aujourd’hui le burn-out : c’est un état dépressif contracté en général au travail. Le burn-out est un véritable péril pour  la santé des employés et des patrons trop impliqués. Les victimes ne se savent pas toujours atteintes et continuent de s’adonner à leurs tâches, alors que leur état se dégrade. Elles se sentent déconcentrées,  fatiguées, épuisées. Ces personnes se disent que ça ira mieux dans deux ou trois jours. Et ça ne va pas mieux ! Le burn-out conduit inéluctablement les individus à l’isolement, la faute professionnelle, l’accident, voire au suicide. L’arrêt de travail causé par un burn-out va en moyenne de 7 à 18 mois. Les causes du mal sont identifiées : le harcèlement par la hiérarchie ou des collègues et l’hyper-connexion due aux outils numériques. Une situation de menace peut être liée  à l’intensité et à la durée d’utilisation de ces outils. Si vous avez des symptômes pouvant se rapporter au burn-out, identifiez ce que la psychologue Catherine Vasey nomme « les lieux d’usure ». Il peut s'agir d'un manque de motivation prolongé, une réaction de stress face aux collègues, à la sonnerie du téléphone, un sentiment d'impuissance, une extrême fatigue devant les écrans. Vous rallongez votre journée pour tenter d'aquérir de nouveau l'efficience passée. Vous vous sentez comme une fourmi égarée. Consultez la médecine du travail et votre médecin traitant. Le burn-out est une peste insidieuse.

Nous avons tous une grille de lecture différente de notre métier. Si certains travaillant par passion, ne comptent pas leurs heures, d’autres restent à la tâche par conscience professionnelle et/ou par abus. Dans tous les cas, les outils de communication  peuvent s’avérer contre productifs s’ils sont utilisés en excès. Cet excès constitue une menace pour notre santé. Alors, une régulation semble de bon aloi, même si les contours n’en sont pas définis. Les entreprises en achèveront les desseins lors des négociations syndicales annuelles sur la qualité de vie professionnelle.

- « Dites donc, vous partez en avance et vous êtes arrivée en retard aujourd'hui déjà ! »

- « Ben, justement, je voudrais pas être en retard deus fois dans la meme journée !!! »

Coluche


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